Réorientation, changement ou évolution de carrière ? Les bonnes questions à se poser
En 1914, 86% des français étaient agriculteurs, naissaient, travaillaient, se mariaient et mouraient dans le même village que leurs parents, cultivant la terre que leurs aïeux avaient toujours cultivée (à la nuance près des grandes vagues migratoires liées à des famines, épidémies ou guerres).
A peine un siècle plus tard, le monde a connu des bouleversements tels qu’ils ont impacté non seulement notre quotidien mais également l’ensemble des métiers, y compris quelques bastions que l’on aurait pu croire intouchables comme celui des hommes de loi.
Notaires, avocats, juristes d’entreprise, tous ont connu des mutations profondes dans leur exercice professionnel qui poussent aujourd’hui nombre d’entre eux à s’interroger sur l’évolution ou la réorientation de leur activité.
Tout au plus sont-ils conscients que leur activité professionnelle risque d’être moins linéaire que celle imaginée lorsqu’ils ont quitté l’Université et qu’un jour ils devront se pencher sur la « gestion » de leur carrière.
Accompagnant au quotidien des professionnels du droit dans leur évolution ou leur ré-orientation professionnelle via des « bilans de compétences », je peux témoigner de l’ampleur du phénomène et du nombre de personnes confrontées au sujet.
Notaire, avocat, juriste, pour aborder la difficile question de la réorientation, du changement ou de l’évolution de votre carrière, encore faut-il vous poser… les bonnes questions.
La première est la suivante : « suis-je à ma place dans ce métier? ».
Si la réponse est « Oui », c’est la situation la plus simple et vous devez simplement faire évoluer votre activité, comme n’importe quelle entreprise. Si la réponse est « Non » ou « Je ne sais pas trop », il vous faut probablement envisager une ré-orientation professionnelle. Et c’est là que les choses se corsent.
Saisir la crise comme une opportunité
Ce sentiment de ne pas (ou plus) être à sa place dans son métier est le plus souvent vévu comme une situation de crise.
En chinois, la situation de crise se dit « weiji » et se traduit par les deux idéogrammes suivants:
Le premier idéogramme, Wei, exprime la notion de danger lié à la crise.
Mais le second idéogramme, Ji, exprime la notion d’opportunité que procure la crise puisqu’elle met fin à une situation pour en révéler une autre qui se pourrait bien être au final meilleure que la précédente…
Cette période de crise est donc le moment critique, le temps de prendre le temps de répondre à des questions de fond sur les orientations à donner à votre vie. C’est une réflexion holistique qui intègre nécessairement tous les aspects de votre vie.
Il s’agit d’une phase d’introspection essentielle, sans laquelle nous passons à côté des motivations profondes (ou drivers) qui nous animent et nous donnent envie d’avancer et de nous dépasser.
Les motivations de chacun sont très personnelles et peuvent, de surcroît, évoluer au fil du temps.
Pour arriver à changer d’activité, il faut donc avoir, dans un premier temps, effectué cette phase d’introspection, pour pouvoir identifier une ou plusieurs activités en phase avec vos réponses.
Identifier ses motivations profondes
Pour pouvoir avancer, la première question à se poser est de savoir quel est votre « podium ». Par podium, on entend ce qui serait, pour vous, la consécration ultime de votre activité, ce à quoi vous rêvez ou rêveriez de parvenir (pénaliste de renom, n°1 des deals de sociétés cotées, plus grosse étude de Notaires de Paris, Bâtonnier, Directeur Juridique d’une entreprise du CAC 40…).
La seconde question est de savoir quels sont vos moteurs dans la vie, vos « drivers »? Etes vous plus motivé par l’argent, le pouvoir, la nouveauté, la reconnaissance, le succès, la solidarité, la perfection… ?
Sans avoir identifié vos motivations, vous ne serez pas en mesure de déterminer les leviers sur lesquels agir pour faire évoluer favorablement votre activité.
Choisir et renoncer
Toute évolution ou changement impose de regarder avec lucidité ce à quoi vous allez devoir renoncer.
On peut renoncer à des choses perçues comme agréables comme des vacances, des horaires réglés, un poste de pouvoir, une rémunération confortable…
Mais il peut tout aussi bien s’agir de renoncer à des choses moins agréables comme une surcharge de travail, des déplacements inutiles, des tâches ingrates…
Considérer les facteurs d’échec intrinsèques et extrinsèques
Une fois identifié ce à quoi je vais devoir renoncer, il faut déterminer ce qui pourrait me faire échouer.
Il s’agit là de prendre en compte aussi bien les causes intrinsèques (les risques d’auto sabotage, notamment) que les causes extrinsèques (changement brutal de la législation ou arrivée d’un nouveau concurrent, par exemple).
Cette question est fondamentale car elle invite à une sorte d’audit des risques d’échec. Nous portons tous en nous nos propres risques d’échecs liés à notre personnalité (se replier sur soi en cas de stress, laisser tomber à la première difficulté, peur du regard de l’autre, peur d’échouer…) et il est indispensable de bien les identifier avant de se lancer.
Elle nous invite également à nous intéresser avec acuité à l’environnement extérieur pour identifier et déceler en amont ce qui pourrait mettre en péril notre projet (l’arrivée de l’automobile pour le maréchal ferrant de la fin du XXème siècle, par exemple).
En résumé
Il ne s’agit pas de dresser une liste exhaustive des questions à vous poser, des freins, des contraintes, des atouts, des compétences et autres pour faire évoluer ou ré-orienter votre activité professionnelle, mais de pointer des questions que l’on ne se pose pas nécessairement et qui sont, pour autant, indispensables.
Et si vous deviez retenir 3 conseils pour faire évoluer votre activité, ce pourrait être:
- vous connaître : car c’est en vous que se trouve la solution et qu’il faut donc partir de vous
- écouter son intuition : car par définition elle ne peut se tromper
- échanger, s’ouvrir, partager: car l’ouverture et le partage permettent de recueillir des informations indispensables pour votre réflexion